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Caractérisation des réponses physiologiques et moléculaires à la sécheresse de l’érable à sucre (Acer saccharum) et de l’épinette blanche (Picea glauca) : approches écophysiologique et transcriptomique

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Ribeyre, Zoé (2025). Caractérisation des réponses physiologiques et moléculaires à la sécheresse de l’érable à sucre (Acer saccharum) et de l’épinette blanche (Picea glauca) : approches écophysiologique et transcriptomique. Thèse. « Gatineau », Université du Québec en Outaouais, Département des sciences naturelles, 216 p.

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Résumé

Les forêts jouent un rôle fondamental dans l’équilibre des écosystèmes en offrant de nombreux services écosystémiques qui régulent le climat et bénéficient aux sociétés humaines. La dégradation des forêts et de leurs réseaux écologiques suscite donc de vives préoccupations. La sécheresse est une perturbation majeure pour les forêts. Elle se manifeste entre autres en impactant le taux de croissance et la vigueur des arbres et en accentuant leur vulnérabilité aux autres perturbations et leur taux de mortalité. Dans le contexte des changements globaux, il est attendu que la fréquence et l’intensité des évènements de sécheresse s’accentuent d’ici la fin du siècle. L’altération et le déplacement des niches écologiques déjà en cours pourraient donc s’accentuer et dépasser la capacité d’adaptation et de migration des arbres. Intervenant à l’échelle individuelle, le processus d’acclimatation permet aux arbres de s'ajuster aux modifications environnementales auxquelles ils sont soumis tout au long de leur cycle de vie. La capacité d’acclimatation d’une espèce reste toutefois limitée et les mécanismes impliqués dans le potentiel d’acclimatation des arbres face à la sécheresse sont encore peu décrits. L’épigénétique est un domaine en extension depuis les années 1990 et offre une approche très prometteuse pour compléter notre compréhension de l’impact de l’environnement sur les plantes. Cependant, les mécanismes épigénétiques sont encore très peu étudiés chez les arbres, car de nombreux défis doivent encore être relevés pour utiliser pleinement cette approche à l’étude d’organismes complexes et possédant un large génome. Les angiospermes et les gymnospermes présentent de nombreuses spécificités moléculaires et physiologiques qui découlent de leur grande distance évolutive datant de plus de 300 millions d'années. La comparaison de ces deux lignées évolutives en contexte de sécheresse offre donc un cadre avantageux pour identifier les différentes réponses et stratégies adoptées par les arbres face à ce stress. Les espèces cibles de cette étude sont l'érable à sucre (Acer saccharum [Marsh]) et l'épinette blanche (Picea glauca [Moench] Voss), deux espèces ligneuses avec une large aire de répartition en Amérique du Nord et avec une forte influence écologique et économique au Canada.
L’objectif principal de cette étude était de caractériser les processus physiologiques et moléculaires induits par la sécheresse qui pourraient contribuer au potentiel d’acclimatation à la sécheresse de l’érable à sucre et de l’épinette blanche. Le premier chapitre de cette thèse est une revue de littérature qui synthétise les connaissances actuelles des mécanismes épigénétiques chez les arbres et qui pointe les avancées récentes dans ce domaine. Cette revue propose également des pistes de recherches pour combler les lacunes du domaine pour l’étude des arbres. La revue pointe notamment qu’une des prochaines étapes pour intégrer pleinement l’épigénétique à l’étude d’espèces ligneuses non modèles est d’améliorer la disponibilité de leurs ressources génomiques. Le deuxième chapitre s’est intéressé au concept de mémoire de stress environnementale, un processus sous le contrôle des mécanismes épigénétiques. Ce processus a été décrit chez de nombreuses espèces herbacées pour améliorer la perception et la tolérance au stress après plusieurs expositions. Cependant, les études dans ce domaine sur les arbres sont rares et se limitent majoritairement à des genres modèles comme Populus et Picea ou Pinus. Ce chapitre avait pour objectif de tester si des traitements de sécheresses successives (modérée, puis sévère) au cours d’une même saison de croissance, permettraient de déclencher et de mesurer une mémoire de stress, ou au contraire, une accumulation des effets délétères desstress chez l’érable à sucre et l’épinette blanche. Les résultats obtenus n’ont pas permis de mettre en évidence un patron de mémoire de stress chez les deux espèces. L’érable à sucre a démontré une accumulation de stress des plants doublement stressés avec une réduction de la photosynthèse par rapport aux plants soumis à un seul stress. En revanche, bien qu’aucune des deux hypothèses n’ait pu être validée pour l’épinette blanche, celle-ci a démontré une tolérance inattendue aux différents traitements de sécheresse. Cette étude a révélé la complexité de déclencher et de mesurer un patron de mémoire de stress chez les arbres en milieu semi-contrôlé. Par ailleurs, la forte variabilité intraspécifique observée a souligné la nécessité de repenser l’approche sur plusieurs saisons de croissance. Dans les troisième et quatrième chapitres, un assemblage transcriptome de novo a été réalisé pour chacune des deux espèces pour servir de référence aux analyses transcriptomiques. L’objectif du troisième chapitre était d’établir une caractérisation temporelle du transcriptome des plants d’épinettes blanches soumis à une sécheresse sévère en serre de 22 jours. Les résultats ont montré que la régulation transcriptomique s’accentuait fortement en fonction du temps d’exposition au stress. Il a notamment été observé une régulation à la baisse des processus de croissance et de photosynthèse, et une régulation à la hausse des processus de défense antioxydante. Cette étude a également souligné le rôle potentiel, encore très peu décrit dans la littérature, du métabolisme des lipides dans la réponse à la sécheresse chez l'épinette blanche. De plus, plusieurs gènes potentiellement clés dans la réponse à la sécheresse chez cette espèce ont été identifiés. Enfin, le quatrième chapitre avait pour objectif d’identifier les gènes clés et de comparer les fonctions et les processus biologiques mobilisés par différentes conditions de sécheresse (courte et longue) chez l’érable à sucre et l’épinette blanche en utilisant une approche transcriptomique. Le premier objectif de ce dernier chapitre était de réaliser une caractérisation intraspécifique des effets d’une sécheresse longue et modérée par rapport à une sécheresse courte et sévère sur la régulation des gènes de l’érable à sucre et de l’épinette blanche. Puis, le second objectif était d’établir une comparaison interspécifique de la réponse à la sécheresse des deux espèces sur la base des fonctions et des processus induits ou inhibés en réponse aux deux types de sécheresse. Pour ce faire, des jeux de données issus d’une expérience d’exclusion hydrique à long terme (6 ans) dans un jardin expérimental, et des jeux de données provenant d’expériences de sécheresse à court terme (3 semaines) en serre ont été utilisés. Les résultats ont mis en avant une augmentation des processus de transport transmembranaire chez les deux espèces face à une sécheresse longue. Cependant, les espèces présentaient globalement des réponses distinctes face aux deux types de stress, où l’érable à sucre s’est distingué avec une régulation transcriptomique plus accentuée par rapport à l’épinette blanche face à la sécheresse longue. De plus, l’érable à sucre présentait une plus forte similitude de réponse entre les deux conditions que l’épinette blanche avec cependant une forte différence dans les patrons de régulation génique. Ces analyses ont également permis d'identifier plusieurs gènes qui constituent de potentiels bons candidats pour de futures études fonctionnelles chez les deux espèces.
L’ensemble de cette thèse de doctorat apporte une meilleure compréhension des processus physiologiques et moléculaires engagés dans la réponse à différentes modalités de sécheresse de l’érable à sucre et de l’épinette blanche. Cette étude a également participé à améliorer les ressources transcriptomiques des deux espèces et à identifier plusieurs gènes potentiellement impliqués dans l’acclimatation à la sécheresse des deux espèces cibles.

Forests are crucial for ecosystem balance, delivering many ecosystem services which regulate our climate and support human societies. The degradation of forests and forest ecology networks is alarming. Drought is an important disturbance of forests, primarily through its effects on tree growth rates and vigor and by increasing their vulnerability to other disturbances and their mortality rate. Without taking mitigation measures, climate change projections indicate that the frequency and intensity of drought events will increase through the end of the century. The shift and displacement of ecological niches, which we are already witnessing, may thus be dramatic and push tree adaptive and migratory limits. At the individual level, acclimation is the process by which trees adapt to the environmental changes they experience over their lifetime. But the acclimation capacity of a species is limited, and the mechanisms governing the acclimation potential of trees to drought are poorly understood. Since the 90s, epigenetics has emerged as a growing field and a novel way to study how the environment affects plants. However, epigenetic mechanisms remain largely unexplored in trees, as many challenges still need to be addressed before fully applying this approach to the study of complex organisms with large genomes. Angiosperms and gymnosperms have sharply diverged from each other for more than 300 million years, and they possess many molecular and physiological specificities. This enables a useful framework for understanding the variable responses and strategies of trees to drought by comparing the evolutionary lineages of two lineages. This study focuses on sugar maple (Acer saccharum [Marsh]) and white spruce (Picea glauca [Moench] Voss), two tree species that are distributed widely across North America and have high ecological and economic value in Canada. The main objective of this study was to characterize the physiological and molecular responses induced by drought that could contribute to the acclimation potential of sugar maple and white spruce. The first chapter of this thesis is a literature review that synthesizes current knowledge on epigenetic mechanisms in trees and highlights recent advances in the field. This review also proposes research directions to address existing gaps in tree studies. Notably, one of the next steps to fully integrate epigenetics into the study of non-model woody species is to improve the availability of their genomic resources. The second chapter focuses on the concept of environmental stress memory, a process controlled by epigenetic mechanisms. Such a process has been reported for various species in herbaceous systems to improve stress perception and tolerance to recurrent stresses. Nonetheless, research on this issue in trees is still limited, mostly having focused on model genera such as Populus, Picea, or Pinus. This chapter sought to investigate if consecutive drought treatments (moderate, then severe) within one growing season would induce and reveal a stress memory, or rather, lead to cumulative detrimental effects in sugar maple and white spruce. Neither species showed strong evidence for a stress memory pattern in the results. Sugar maple showed accumulation of stress in seedlings exposed to double stress, with a reduction in photosynthesis compared to plants exposed to a single stress event. Alternatively, white spruce was not supported by either hypothesis but displayed unexpected drought tolerance in treatments. This study highlighted the complexity of triggering and measuring a stress memory pattern in trees under semi-controlled conditions. Furthermore, the strong intraspecific variability observed underscored the need to reconsider the approach over multiple growing seasons.
Chapter 3 and 4 are based on de novo transcriptome assembly for both species to be used as a reference for transcriptomic analyses. The third chapter aimed to establish a temporal characterization of the transcriptome of white spruce seedlings subjected to severe drought over 22 days in a greenhouse. The results showed that transcriptomic regulation significantly increased with the duration of stress exposure. Notably, downregulation of growth and photosynthesis processes, and upregulation of antioxidant defense mechanisms, were observed. This study also pointed out the potential role for lipid metabolism in white spruce response to drought, which is still poorly described in the literature. Additionally, several genes potentially crucial for drought response in this species were identified. Lastly, chapter four focused on identifying important genes, and comparing what biological functions and processes activated under different drought conditions (short and severe versus long and moderate) in sugar maple and white spruce using a transcriptomic approach. The first objective of this chapter was to characterize the intraspecific effects of prolonged moderate drought compared to short severe drought on gene regulation in both species. The second objective was to establish an interspecific comparison of drought responses based on the biological functions and processes activated or inhibited under both drought conditions. To do this, we relied on data sets from a long-term (six-year) drought exclusion experiment within an experimental garden as well as from short-term (three-week) drought experiments in a greenhouse. The results highlighted an increase in transmembrane transport processes in both species in response to prolonged drought. Overall, the species differed in their response to the two stress types, with sugar maple demonstrating stronger transcriptomic regulation than white spruce under prolonged drought. However, with different patterns of gene regulation, sugar maple was also more similar in its response to the two conditions than white spruce. These analyses also pinpointed several genes as promising candidates for future functional studies in each species.
This thesis provides new insights on the physiological and molecular responses of sugar maple and white spruce responding to varying drought conditions. This study also aided in the enhancement of transcriptomic resources for both species, and the identification of several genes possibly implicated in their acclimation to drought.

Type de document: Thèse (Thèse)
Directeur de mémoire/thèse: Messier, Christian
Co-directeurs de mémoire/thèse: Nolet, Philipe
Mots-clés libres: Érable à sucre; Épinette blanche; Forêts; Sécheresse; Transcriptomique; Mémoire de stress; Épigénétique; Acclimatation
Départements et école, unités de recherche et services: Sciences naturelles
Date de dépôt: 11 mars 2025 12:36
Dernière modification: 11 mars 2025 12:36
URI: https://di.uqo.ca/id/eprint/1753

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